Après les articles :

  • La TSF militaire au service de la Grande Guerre
  • Le cryptage lors des conflits mondiaux
  • Le Chiffre (codage – décodage)

On ne pouvait pas laisser sous silence, la fameuse machine de codage et décodage Enigma

Enigma est une machine électromécanique portable utilisant des rotors (3 pour l’armée de terre et 4 pour la marine, plus pour les dernières versions) pour le chiffrement et le déchiffrement des messages.

Été 1940. La guerre semble avoir choisi son camp. La Pologne, la France ont capitulé. La Grande-Bretagne résiste, mais elle dépend, pour la moitié à peu près de son approvisionnement en matières premières, des importations maritimes. Or, dans les mers, les sous-marins allemands, les redoutables U-Boot, font régner la terreur, coulant de nombreux navires. Ils attaquent de nuit, en meutes. Pour leur coordination tactique, ils échangent de nombreux messages radios, avec le commandement à terre. Ces messages sont cryptés à l’aide d’une remarquable machine, l’Enigma.

L’Enigma est une machine à chiffrer inventée initialement par Arthur Scherbius et Richard Ritter en 1918. Cette machine, créée par ses inventeurs pour s’amuser, connaît en réalité un grand succès commercial, et près de 30 000 modèles civils sont vendus, notamment à des banques ou à de grandes compagnies.

L’armée allemande, qui sait l’importance du renseignement dans les conflits modernes, se dote alors massivement d’une version militaire de cette machine. Elle se présente sous la forme d’une caisse en bois de 34×28×15 cm, et pèse une douzaine de kilos. Elle est composée de :

  • 1 clavier alphabétique
  • 1 tableau de connexion
  • 3 rotors mobiles à 26 positions
  • 1 rotor renvoi à 26 positions (le réflecteur)
  • 1 tableau de 26 ampoules correspondant aux 26 lettres de l’alphabet.

Le principe de fonctionnement de l’Enigma est à la fois simple et astucieux. A chaque fois que l’on presse une lettre, un circuit électrique est fermé, et s’éclaire une ampoule qui correspond à la lettre codée. Le circuit qui est fermé dépend de la position des rotors. A chaque lettre frappée, un ou plusieurs des rotors mobiles tourne, changeant la substitution qui sera opérée à la prochaine touche pressée. De plus, le chiffrage est réversible : si en tapant A vous codez D, si vous aviez tapé D, vous auriez codé A. Ainsi, si le commandement allemand et le sous-marin ont le même réglage de départ, il suffit à l’opérateur du sous-marin de taper directement le message codé pour obtenir le message clair. Les Allemands avaient donc diffusé dans leurs services des carnets de code permettant de réactualiser chaque jour à minuit les machines, par la position initiale des rotors. Ces carnets de code étaient valables un mois.

Le nombre de combinaisons est gigantesque et les allemands ont une confiance totale en la machine Enigma, dont ils fabriqueront 100.000 exemplaires. Au su et au vu de tous, ils s’échangeront des communications radios cryptées, persuadés que jamais les Alliés ne les comprendraient.

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Pour les versions les plus évoluées, le nombre total de combinaisons, soit le produit des combinaisons des choix des rotors, de leurs positions de départ et du tableau de connexion, est donc :

60 x 17 576 x 150 738 274 937 250 = 158 962 555 217 826 360 000 = 1,59 x 1020

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La Pologne s’est trouvée ressuscitée en 1919 par le traité de Versailles. Craignant son voisin allemand (à juste titre!), elle se dote d’un très performant service du chiffre, et se tient à l’écoute des communications allemandes. Le renseignement polonais parvient à se procurer une machine Enigma civile et à comprendre sa façon de fonctionner. Malheureusement, les rotors des machines militaires étaient différents, et impossibles à reconstituer

C’est d’abord une trahison qui va aider les Polonais, celle de Hans-Thilo Schmidt. Il est le frère de Rudolph Schmidt, qui est à la tête du corps des signaux de l’armée allemande et est celui qui a imposé la machine Enigma. Ayant des ressentiments envers son frère et la patrie (peut-être parce que lui-même fut écarté de l’armée après l’armistice de 1918), Hans-Thilo Schmidt vend en novembre 1931 à un agent secret français du nom de Rex les plans de la version militaire d’Enigma. Les Français, qui ont alors toutes les clés en mains, ne fabriquent pas de copie de la machine Enigma, mais elle procure les document aux Polonais.

Suite et fin en partie 2

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73 de Jean-Luc Desgrez – F5NKK