Durant les derniers mois de la grande exposition de Londres, on vendait dans l’intérieur du Palais de Cristal des cartes météorologiques à 10 centimes qui faisaient comprendre un des plus utiles emplois du télégraphe électrique. Un télégraphe placé dans le local de l’exposition communiquait avec tout le système télégraphique d’Angleterre. À neuf heures du matin, chaque jour l’état du vent et du temps était transmis à la station centrale de Londres et de là au Palais de Cristal. On avait des cartes tout imprimées, et on y plaçait chaque jour la direction du vent, la hauteur du baromètre, du thermomètre, observée et transmise le jour précédent, à côté du nom de chaque ville qui avait correspondu. On possédait réellement une carte météorologique d’Angleterre pour le matin du jour précédent. « Une fois, dit M. Archer, nous désirâmes connaître l’état actuel de l’atmosphère dans dix-huit villes, pour le comparer à celui de la veille, et en une demi-heure notre curiosité fut satisfaite. »

Dans les élections de 1852, le gouvernement et la compagnie électrique firent un arrangement qui permit de connaître à Londres à toute heure l’état du scrutin que le gouvernement transmettait ensuite, à tous les journaux et aux personnes intéressées. Ceci n’a rien d’extraordinaire ; mais ce qu’il est curieux de constater, c’est que plus d’un millier de messages passèrent sur les fils électriques de la station centrale de Lothbury dans Londres. Outre cette station centrale, il en existe douze ou quinze autres allant à la Banque, à l’Amirauté, au palais de la reine, à l’office général des postes et à plusieurs stations de chemins de fer.

On a essayé d’établir une concurrence à la grande et ancienne compagnie électrique, mais cela présente de graves difficultés. C’est seulement dans les districts manufacturiers du nord que la nouvelle compagnie, sous le nom de Compagnie Britannique, opérant en vertu d’un acte obtenu du parlement en 1850, a pu établir ses fils électriques. Les arrangements pris avec les riches et nombreuses cités manufacturières permettent à cette compagnie un immense développement, qui sera, dit-on, accompli dans la première moitié de 1853. L’acte parlementaire de 1850 autorise la Compagnie Britannique à ouvrir et creuser toutes les rues, grands chemins et routes qu’il lui semblera utile de parcourir. Enfin de la station centrale de Barnsley partira un fil souterrain de 300 kilomètres de longueur qui arrivent à Londres et établira la communication entre les télégraphes de la compagnie et la métropole. Comme il est plus facile de suivre par un fil souterrain la voie d’un chemin de fer qu’une route ordinaire, la Compagnie Britannique prétendit qu’elle avait le droit de creuser le long des voies de fer occupées par la compagnie ancienne, dont les fils sont portés par des poteaux. Aucun arrangement n’ayant pu avoir lieu, la question se représentera en 1853 au parlement.

Toutes ces remarques se rapportent presque exclusivement au télégraphe aérien ou, si l’on veut, à celui dont les fils sont placés au-dessus du sol et portés par des poteaux ; mais on sent de plus en plus le besoin de télégraphes à fils souterrains, et surtout pour les villes où le système de la suspension est presque impossible. Par exemple toutes les principales stations de Londres et des autres capitales sont reliées par des fils passant sous le pavé des rues ou des routes ; les fils sont recouverts de gutta-percha, et de plus ils traversent et suivent des tuyaux de fer ou de bois qui les protègent. Dans quelques pays du continent, en Prusse par exemple, le système souterrain était adopté dans ces dernières années à l’exclusion de tout autre ; mais en plusieurs localités les poteaux commencent à être préférés. Espérons que notre administration, forte de ses lumières et de celles de M. Bréguet, modifiera les propriétés de dilatation de la gutta-percha pour l’emploi commode des fils souterrains, emploi dont on s’est déjà si bien trouvé pour les câbles sous-marins.