Transmis avec la rapidité de la fondre. (VIRGILE.)

La télégraphie électrique a pour but d’envoyer, au moyen des courants électriques, des signaux à de grandes distances. La France semble devoir être le pays le plus favorable aux communications télégraphiques. Les télégraphes aériens de Chappe ont fait jusqu’à nos jours honneur à la France, ainsi que le reconnaît un auteur anglais, et l’usage de ces appareils n’est point encore abandonné ; ils ne redoutent que les temps de brouillard, qui interceptent la vision des flèches mobiles qu’ils emploient. Quoique la rapidité de transmission des dépêches par cette voie parût, vers la fin du siècle dernier, tout à fait admirable, elle n’est rien, comparée à la vitesse de l’électricité sur les fils conducteurs, car on sait par des expériences précises, et dont l’initiative est due à M. Wheatstone, que le courant électrique, en une seconde de temps, ferait plusieurs fois le tour de la terre et d’abord qu’est-ce que c’est que l’électricité ?

Il y a en général trois manières de définir : par étymologie, par énumération, par théorie.

L’expérience de Wheeler – gomme quantique à choix retardé

L’électricité a emprunté son nom de la substance appelée par les Grecs électron, par les Latins succin, et par les Arabes carabé. Le succin ou ambre jaune est une résine fossile qui, comme toutes les résines, s’électrise par le frottement. Si le lecteur veut bien prendre, un bâton de cire à cacheter ordinaire et le frotter sur une étoffe quelconque en allant toujours dans le même sens, il verra que ce bâton ainsi électrisé attire fortement les fils ordinaires et les corps légers dont on l’approche. Cette propriété était comme dans l’école de Thalès cinq ou six siècles avant notre ère. C’est seulement dans le siècle dernier que l’on découvrit que l’action d’un corps électrisé pouvait être transmise au loin par un fil métallique convenablement supporté et isolé. L’expérience est de Gray et de Wheler.

Définir l’électricité par l’énumération de ses effets serait une tâche bien vaste aujourd’hui, où l’on a reconnu qu’il n’est à peu près aucun phénomène de la nature vivante ou inorganique, — dans l’atmosphère, sur la terre, sur les mers, — où son action ne vienne se mêler, sans compter les orages de foudre où l’électricité joue le principal rôle. Disons seulement, en ce qui se rapporte à notre sujet, que l’électricité, quelle que soit sa nature ou son origine, est susceptible d’être transmise à toute distance le long des fils métalliques, et qu’elle s’y propage avec une rapidité presque infinie.

Enfin, si nous voulons définir théoriquement l’électricité, nous concevrons cet agent comme un fluide excessivement léger, susceptible de se répandre, de couler pour ainsi dire le long des corps conducteurs, de manière à en atteindre instantanément les extrémités les plus éloignées par une espèce de courant, dont l’écoulement donne naissance à des actions mécaniques, physiques, physiologiques en traversant les différens corps. Au milieu du siècle dernier, la commotion nerveuse produite par l’appareil appelé bouteille de Leyde appela l’attention du public sur l’électricité agissant ainsi sur l’homme et sur les animaux, et la phrase se faire électriser indique encore l’effet de cette expérience sur l’homme. Plus tard. Franklin ayant soutiré l’électricité des nuages et inventé les paratonnerres, l’attention resta fixée sur cette branche importante de la physique.

Tout à la fin du dernier siècle, Volta, en empilant plusieurs disques de deux métaux différens, séparés par des disques non métalliques, mit au jour un appareil merveilleux, qui non-seulement produit de l’électricité, mais qui la renouvelle continuellement dès qu’elle s’est écoulée par un fil métallique. Voilà notre courant télégraphique : un appareil de Volta, une pile électrique, à Paris, étant armée à sa partie supérieure d’un fil de fer ou de cuivre qui va porter l’électricité, jusqu’à Marseille, produit un courant continu, allant de la première de ces villes à l’autre, en sorte que, si l’on avait un moyen de savoir quand le courant passe ou ne passe pas par le fil, on pourrait, en lançant ou arrêtant à Paris le courant électrique, faire des signaux à Marseille, ou même à une distance bien plus grande, et cela instantanément.

Or c’est précisément ce que nous pouvons faire au moyen de la découverte. d’OErsted, physicien danois, qui, en 1820, trouva que, quand on fait parcourir un fil métallique à un courant parti d’une pile de Volta, il annonce son passage en agitant une aiguille aimantée placée près du fil métallique et le long de celui-ci. Pour faire donc un signal de Paris à Marseille, nous aurons près de l’extrémité du fil, qui est dans cette dernière ville, une aiguille aimantée, et par les mouvemens qu’elle prendra quand nous enverrons le courant, nous aurons le signal de Paris. Pour faire de ces signaux un véritable alphabet, nous conviendrons que les lettres A, B, C, etc., seront représentées par un certain nombre de mouvements de l’aiguille à droite ou à gauche. Tel est le fondement et la manière de procéder du télégraphe dit télégraphe anglais parce qu’il est à peu près exclusivement employé de l’autre côté de la Manche. La première indication de ce télégraphe fut donnée par l’illustre Ampère, ainsi que nous le verrons tout à l’heure. Dans les premières années qui suivirent l’invention de la pile de Volta, Soemmering proposa de faire des signaux par la pile voltaïque en faisant agir chimiquement le courant à une grande distance sur des matières décomposables par l’électricité ; mais il était fort douteux que l’énergie chimique du courant fût capable de se transmettre efficacement à de grandes distances.